En rentrant de l’école, un mardi de février, mon fils de sept ans se met à produire un son impossible à identifier : tidlidiiiii tadaaaaaa tilidou… Tout fier de lui, il m’explique que c’est une chanson de La Bolduc que son enseignante de musique a fait découvrir à sa classe. Il continue à interpréter très librement ce succès populaire pendant le reste du trajet. Son intérêt pour ce répertoire me surprend. Je prends la mesure de mon ignorance. Bien que j’aie étudié la musique pendant de nombreuses années, je n’ai jamais été initiée à la musique traditionnelle québécoise.

Afin de transcender mon inculture, j’ai eu l’honneur de rencontrer Antoine Gauthier, violoneux et président du Conseil québécois du patrimoine vivant. Nous avons discuté de l’enseignement de la musique traditionnelle, mais surtout d’une question plus générale, soit la place du patrimoine vivant. Le texte qui suit reprend l’essentiel de notre échange.

Qu’est-ce que le patrimoine vivant?

Le patrimoine vivant, également appelé « patrimoine immatériel », est un concept qui englobe toutes sortes d’activités humaines transmises de génération en génération. Il s’agit d’un patrimoine qui se lègue principalement par la pratique et l’expérience. La musique, la danse, le conte, les techniques artisanales, la cuisine traditionnelle, les croyances et les rituels font partie du patrimoine vivant.

À quoi sert-il de le valoriser?

La réponse simple de l’Unesco : pour contrer l’uniformisation du monde.

À une époque où la mondialisation risque d’entraîner une uniformisation culturelle, la promotion du patrimoine vivant peut aider à préserver la diversité culturelle et à renforcer l’identité des communautés locales. Si certains peuvent y voir une forme de repli identitaire, il n’en est rien. Le patrimoine vivant est plutôt une expression de la valeur de la diversité culturelle et un moyen de promouvoir l’inclusion et la cohésion sociale. Par exemple, lorsque nous voyageons, nous apprécions la richesse culturelle du pays que nous visitons. Si nous souhaitons à notre tour participer à l’enrichissement des échanges culturels à l’échelle de la planète, nous ferons vivre les traditions et les savoir-faire uniques à notre réalité territoriale.

Le patrimoine vivant peut également soutenir la résilience des communautés lors de changements économiques et environnementaux. Il est en effet souvent associé à des pratiques durables telles que l’utilisation de techniques agricoles traditionnelles ou la fabrication locale de produits. En encourageant les pratiques traditionnelles, on peut même réduire l’empreinte carbone et la dépendance aux produits industriels. Autrement dit, la valorisation du patrimoine vivant permet de redonner du pouvoir à l’humain et à la communauté à petite échelle, tout en produisant un impact à grande échelle.

Comment peut-on l’intégrer à l’école?

L’approche à privilégier pour l’enseignement du patrimoine vivant est de montrer à faire plutôt que de seulement expliquer la théorie d’une manifestation culturelle. Il repose sur une transmission du savoir-faire par la relation humaine, par l’expérience. On souhaite amener les élèves à prendre part à leur communauté. En initiant les élèves aux pratiques culturelles de leur région, les enseignants leur permettent d’acquérir une meilleure compréhension de leur propre histoire et de leur identité ainsi que de jouer un rôle au sein de leur société.

  • Pour découvrir le patrimoine vivant d’ici : explorez la musique traditionnelle québécoises sur Trad-666.
  • Pour découvrir le patrimoine vivant d’ailleurs : plongez dans le patrimoine vivant de l’Unesco.

Pour intégrer le patrimoine vivant à l’école, il est également possible de faire appel à des artistes locaux pour animer des ateliers culturels en classe. Les sorties scolaires sont aussi  des occasions de découvrir le patrimoine vivant.

Sans chercher nécessairement à former des virtuoses de la turlute, rendre les élèves fiers de leur singularité permettra d’en faire des citoyens ouverts sur le monde. Rencontrer l’Autre est certainement plus aisé lorsque nous avons l’assurance d’avoir quelque chose à partager.

Naholi Allard, conseillère en culture-éducation

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